Mothers' Instinct

F Watchlist

Il paraît (à juste titre) légèrement pervers d'écrire que ce drame psychologique sur une mère ayant perdu son fils de huit ans dans un accident et sur sa voisine redoutant dès lors qu'il arrive un malheur à ses propres enfants, offre un plaisir cinématographique esthétiquement proche de la perfection et, en fin de compte, d'une grande légèreté. Ce paradoxe tient, dans la première moitié du film, à l'élégance des décors, des costumes et des manières bourgeoises du début des années soixante, qui enrobent le drame de la mort d'un enfant d'arrangements raffinés : même dans les moments les plus douloureux, les deux femmes sont toujours d'une élégance irréprochable, servant des amuse-gueules aux formes géométriques et aux couleurs pastel assorties, tandis que les hommes, vêtus de chemises blanches, parlent peu, préparent des cocktails et sirotent des verres de whisky à toute heure du jour et de la nuit – celles et ceux qui ont vu la série Mad Men se sentiront immédiatement en terrain familier. De façon logique et autrement subtile, des éléments de thriller se glissent déjà dans le drame à ce stade de l'intrigue. La mère épargnée par le sort (Jessica Chastain) commence à soupçonner la mère endeuillée (Anne Hathaway – les deux stars sont fantastiques) de vouloir s'en prendre à son fils, puis à sa belle-mère. Cependant, des échanges clarificateurs et la prise de médicaments enterrent pour de bon l'intrigue policière. Ce n'est que dans le dernier tiers du film que le mal pressenti fait son apparition, mais de manière si absurde qu'il est impossible de le prendre au sérieux. Ce qui a commencé comme un drame et s'est transformé en thriller psychologique se termine en comédie noire – ne nous demandons pas si c'est intentionnel.