Riverboom
Claude Baechtold, Suisse, 2023o
L'histoire de trois jeunes reporters qui montent dans une voiture pour un périple en Afghanistan qui va changer leur vie à tout jamais: Serge, un journaliste moraliste et bourreau de travail, Paolo, un photographe aussi jovial qu'inconscient, et Claude, un typographe suisse froussard qui s'improvise cinéaste.
Il était une fois en Afghanistan: c’est l’histoire de trois jeunes adultes en voyage sur les traces d’Ella Maillart dans un pays du Moyen Orient en l’an 2002. C’est l’histoire de la formation du collectif artistique suisse Riverboom, connu au-delà des frontières nationales pour son humour décalé. C’est l’histoire d’un film que personne n’avait vu venir, accueilli à bras ouverts par le public (près de 12'000 entrées en Suisse romande). Aux dires du réalisateur Claude Baechtold – par ailleurs narrateur et protagoniste de ce documentaire loufoque –, Riverboom a vu le jour dans des conditions hasardeuses. Au début du millénaire, le jeune typographe se fait convaincre par un ami journaliste de l’accompagner en Afghanistan, pays alors chamboulé par la récente intervention militaire américaine. Sur place, les deux Suisses rencontrent le photographe canadien Paolo Woods, qui ne les quittera plus d’une semelle – les trois hommes fonderont plus tard le collectif Riverboom, dont les interventions ont égayé le milieu de l’art pendant deux décennies. Cet improbable trio, cousin du reporter Tintin et des Pieds nickelés, se lance tête baissée sur les routes afghanes. Terrorisé au départ, Claude Baechtold lâche prise peu à peu – et mitraille les paysages de photos, quand il ne braque pas sa caméra sur ces acolytes. À son retour en Suisse, une grande partie du matériel disparaît avant de réapparaître miraculeusement près de vingt ans plus tard. Le film qui en résulte est un éloge du pas de côté: tirant parti de la distance temporelle qui le sépare des images tournées, le réalisateur porte un regard décalé sur cette aventure de jeunesse, (se) jouant des clichés inhérents au genre du récit de voyage – le trio est souvent dépeint comme un groupe de protestants un brin rigides plongés au pays de la débrouille. Si la surenchère d’humour potache agace par moments, l’esprit espiègle du commentaire récité en voix off contribue indéniablement à l’attrait de cet objet filmique non identifié, à mi-chemin entre le road movie et le buddy movie au second degré.
Emilien Gür