Sur l'Adamant
Nicolas Philibert, France, 2023o
L’Adamant est un Centre de Jour unique en son genre : c’est un bâtiment flottant. Édifié sur la Seine, en plein cœur de Paris, il accueille des adultes souffrant de troubles psychiques, leur offrant un cadre de soins qui les structure dans le temps et l’espace, les aide à renouer avec le monde, à retrouver un peu d’élan. L’équipe qui l’anime est de celles qui tentent de résister autant qu’elles peuvent au délabrement et à la déshumanisation de la psychiatrie. Ce film nous invite à monter à son bord pour aller à la rencontre des patients et soignants qui en inventent jour après jour le quotidien.
Un documentariste met les pieds dans une institution de soin pour adultes souffrant de troubles psychiques. Frederick Wiseman ? Non, Nicolas Philibert qui, plus de vingt ans après Être et avoir, regoûte au succès (toute proportion gardée) avec Sur l’Adamant, récompensé par l’Ours d’or à Berlin cette année. Comme son collègue américain, le cinéaste français prend le parti de l’immersion, à ne pas confondre avec celui de la transparence : si aucune voix off ne vient troubler l’observation du quotidien du Centre de Jour l'Adamant, les interactions entre filmeur et filmé.e.s n’ont pas été gommées au montage. Une différence de taille avec le travail de Wiseman, toutefois : là où celui-ci, dans ses meilleurs films, adopte une approche critique du réel, Nicolas Philibert se concentre uniquement sur ce qui fonctionne. L’Adamant, une utopie terrestre ? C’est le point de vue qui se dégage du documentaire, jusqu’à ce qu’une des dernières scènes montre un léger dérapage : une habituée du Centre remontée contre le personnel, frileux à l’idée de lui confier la direction d’un atelier. Un basculement nécessaire pour que le film ne soit pas qu’un plaidoyer pour mais aussi une étude sur l’Adamant.
Emilien Gür