Et la fête continue !
Robert Guédiguian, France, Italie, 2023o
Rosa est le cœur et l’âme de son quartier populaire du vieux Marseille. Elle partage son énergie débordante entre sa grande famille très unie, son travail d’infirmière et son engagement politique en faveur des plus modestes. Mais à l’approche de la retraite, ses illusions vacillent. Portée par la vitalité de ses proches et par sa rencontre avec Henri, elle va réaliser qu’il n’est jamais trop tard pour accomplir ses propres rêves, politiques et personnels.
Avec Aki Kaurismäki et Ken Loach, Robert Guédiguian appartient à l’internationale des cinéastes de gauche, cercle restreint de réalisateurs qui n’ont jamais cessé de confier les premiers rôles aux plus démunis, à pourfendre le capitalisme et à vilipender le nationalisme sous toutes ses formes. Par les temps qui courent, on aimerait qu’ils soient plus nombreux pour nous réchauffer le cœur. Kaurismäki et Loach ont tiré leur révérence ; reste Guédiguian. Avec ses prolétaires sympas, ses Marseillais gouailleurs et ses irréductibles Arméniens, son cinéma est une fête qui, bonne nouvelle, continue. Son nouvel opus raconte l'histoire d’amour entre Rosa (Ariane Ascaride), une infirmière proche de la retraite, et Henri (Jean-Pierre Darroussin), un ancien libraire ayant mis la clé sous la porte pour se rapprocher de sa fille – le tout sur fond de division de la gauche, de crise hospitalière et d’effondrement d’immeubles insalubres. En bon communiste, Robert Guédiguian ne raconte pas une histoire, mais des histoires : à tous ses personnages, il accorde le même degré d’attention – pas question que l’un d’entre eux prennent la tête du groupe. Humaniste farouche et conteur de talent, il sait faire tenir ensemble les différents fils narratifs qu’il déroule, sans tomber non plus dans le piège du film choral. On peut reprocher au dénouement du film sa surenchère euphorique. N’empêche : un peu de tendresse n’a jamais fait de mal.
Emilien Gür