Ripples of Life
Wei Shujun, Chine, 2021o
Une grande star amène une équipe de tournage dans sa ville natale reculée. Alors que la production est marquée par des désaccords entre les membres de l'équipe, la propriétaire d'un restaurant local trompe son ennui en espérant remplacer la star.
Sans doute le film le plus étonnant à nous parvenir de Chine depuis longtemps, ce deuxième long-métrage de Wei Shujun est une révélation. Depuis, on a pu découvrir son superbe polar Only the River Flows. Mais dans Ripples of Life, ce cinéaste d'alors à peine 30 ans propose déjà une réflexion brillante sur septième art. En trois parties, le film raconte l'impact de la préparation d'un tournage sur une petite ville de province. Dans la première, on suit une serveuse au restaurant choisi comme base par l'équipe. Alors qu'elle désespère d'une existence médiocre, elle est remarquée par le réalisateur du making of et commence à s'imaginer un destin d'actrice. Dans la deuxième partie, la star féminine du film débarque dans ce qui est sa ville d'origine. Fêtée par les autorités, elle se retrouve vite entourée d'anciennes connaissances qui espèrent toutes un coup de pouce, dont un ancien amoureux. Quant à la troisième partie, elle raconte avec humour un face-à-face arrosé entre le scénariste, idéaliste à la peine, et le réalisateur vedette, qui insiste pour plus de scènes spectaculaires. Et le tout de se conclure par le premier jour de tournage de... Ripples of Life. Avait-on jamais vu un tel film en Chine, arrivée plus tardivement au stade de la réflexivité? En tous cas, tant la dextérité du cinéaste que sa liberté de ton sont ici bluffants. Même une esthétique typiquement chatoyante n'atténue en rien le réalisme critique de cette mise en abyme. Partout règnent l'insatisfaction, l'envie et l'espoir déçu, exacerbés par ce formidable miroir aux alouettes qu'est le cinéma. Un constat assez terrible, mais d'une portée universelle.
Norbert Creutz