Rapaces
Peter Dourountzis, France, 2025o
Samuel, un journaliste d'investigation, et Ava, sa fille et stagiaire, couvrent le meurtre d’une jeune fille attaquée à l’acide, pour leur magazine. Frappé par la brutalité de ce fait divers, Samuel décide de mener une enquête indépendante, à l’insu de sa rédaction, et découvre des similitudes troublantes avec le meurtre d’une autre femme.
Nul doute que le scénario de Rapaces, il y a quelques décennies, aurait donné lieu à un excellent film de série B hollywoodien. Un journaliste, assisté de sa fille, enquête sur un féminicide. Convaincu que ce meurtre sauvage est lié à une affaire classée, le duo s’embarque dans une investigation truffée de dangers dans quelque province française. On se contentera du film à la réalisation soignée de Peter Dourountzis, soutenu dans son entreprise par France Télévisions et Netflix. Ici, aucune faute de goût, pas l’ombre d’une maladresse: la mécanique bien huilée du thriller fonctionne à merveille. Si aucun des acteur·rices ne s’y distingue – si ce n’est Jean-Pierre Daroussin dans un second rôle de vieux roublard du journalisme d’investigation qui lui sied à merveille –, on ne signale pas le moindre faux pas dans le jeu calibré des interprètes. Sort du lot, en revanche, une scène haletante de suspense dont la mise en scène habile vaut le détour. Sur les traces d’un groupe de jeunes masculinistes blancs, le journaliste et sa fille dînent dans un restaurant routier à une heure tardive. Sans crier gare, les objets de leur quête font irruption dans l’établissement. Si ces derniers savent qu’ils sont traqués, ils ignorent l’identité de leur filateur·rices. En revanche, ils connaissent le véhicule de ces dernier·ères, pour l’avoir embouté durant une course-poursuite. Lorsque les masculinistes repèrent l’automobile du journaliste sur le parking du restaurant et se mettent à attendre son propriétaire, le grand détective et sa fille se savent coincé·es. Comment s’en sortir? La question narrative devient aussi une affaire de mise en scène. Alors qu’il était resté jusqu’à présent très réservé, plus directeur de projet que réalisateur, Peter Dourountzis sort soudain le grand jeu. Au prochain film, on espère qu’il démarrera tout de suite en quatrième vitesse.
Emilien GürGalerie photoso


