Grandir

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Peu connue du grand public, Séverine Barde est l’une des directrices de la photographie les plus renommées de Suisse. Spécialisée dans le documentaire, collaboratrice régulière de Jean-Stéphane Bron et Georges Gachot, elle signe en 2019 son premier film en tant que réalisatrice, Greta Gratos, portrait d’une figure clé de la scène queer à Genève. Ancré dans la même ville, son deuxième long-métrage se situe dans un milieu qui, au premier abord, semble très différent: durant quatre ans, la cinéaste a suivi l’évolution d’une classe de primaire, du premier jour d’école des bambins jusqu’à leur entrée en 5P. Filmé littéralement à hauteur d’enfants, le documentaire se concentre sur les interactions entre ses protagonistes, soulignant leur singularité au regard des normes sociales intériorisées par les adultes. En ce sens, Grandir est aussi une œuvre éminemment queer, impressionnante par sa façon de saisir à vif les échanges, regards et attitudes de ses protagonistes hauts comme trois pommes, qu’on se figure parfois comme des aliens catapultés dans le cadre étranger de l’institution scolaire. Au cours des deux heures du film, entrecoupé d’intermèdes musicaux dispensables, on observe comment les élèves, issus de cultures différentes, s’acclimatent à leur nouvel environnement, encadrés par deux institutrices qui les accompagnent chacune durant deux années. Parmi les moments forts, on retiendra une conversation entre trois fillettes âgées de moins de huit ans autour du conflit israélo-palestinien, ou les pleurs d’une de leurs camarades regrettant leur maîtresse des deux années précédentes, qui en vient à se cacher sous son pupitre pour fuir sa nouvelle réalité. Il en ressort une peinture inédite du processus d’apprentissage de la vie en société, avec tous les défis que cela implique.